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Histoire de la césarienne

La césarienne, c'est quoi ?

La césarienne est une intervention chirurgicale qui consiste à extraire un enfant de l'utérus maternel par incision des parois abdominale et utérine. Contrairement à la légende, le terme ne vient pas de Jules César (qui n'est pas né par césarienne) mais du verbe latin caedere qui signifie « couper ». De nos jours, la césarienne est une technique maîtrisée où la morbidité et mortalité maternelles sont réduites au minimum, sans être pour autant totalement exclues et pour laquelle les indications sont codifiées.

Historique de la césarienne

Les premières césariennes dans l'Antiquité et au Moyen-Age

Il est difficile d'écrire un récit circonstancié de l’histoire de la césarienne. L’opération chirurgicale que nous connaissons aujourd’hui puise notamment ses racines dans les mythologies indo-européennes. Avant d’être un acte technique, elle est d'abord l’enjeu de réflexions sociétales, telles par exemple celles relatives à la Lex Regia édictée par Numa Pompilius 1, Roi Romain régnant de –715 à –673 avant JC et qui ordonnait que toute femme enceinte mourant subitement (en couches ou juste avant le terme), devait être césarisée dans l’espoir de sauver l’enfant s’il était encore en vie. Cette loi, selon Pline l'Ancien, a permis la survie de Scipion l'Africain, Général et homme d'état romain.

La césarienne est également l'enjeu de réflexions religieuses et philosophiques. A l'époque médiévale, une grande question théologique est de déterminer le moment où le fœtus est digne de recevoir le baptême. La question peut étonner de nos jours, mais elle est très importante à cette époque ; en effet, toute personne non baptisée doit rejoindre les armées de Satan au moment du jugement dernier, alors que les êtres ayant reçu le baptême rejoignent celles de Dieu. La césarienne post-mortem devient donc au Moyen-âge un des moyens de baptiser le plus grand nombre de personnes possible.

A l'époque de la Renaissance

Ce n’est qu’à la période de la Renaissance que paraît le premier traité médical entièrement dédié à la césarienne et où l’on trouve la première description de la technique de la césarienne sur femme vivante.

La première opération connue et réussie d'une césarienne sur femme vivante et ayant survécu, date de l'an 1 500. Cette année-là, en Suisse, Jacob Nufer, châtreur de porcs, obtient de la magistrature locale l'autorisation d'opérer sa femme en travail depuis plusieurs jours et dont les médecins et « ventrières » (sages-femmes) consultés jugent impossible l'accouchement par voie naturelle. Plusieurs sources évoquent le succès de cette opération : non seulement son épouse survit, mais elle accouche plus tard à plusieurs reprises. A l'heure actuelle, il est possible de penser qu'il s'agissait d'un cas de grossesse abdominale, ce qui expliquerait la survie de cette femme et le fait qu'elle ait pu porter d'autres enfants, alors même que le « chirurgien » n'avait pas les connaissances médicales pour effectuer les sutures nécessaires à une telle intervention. Par ailleurs, de par son métier, Jacob Nufer devait être en mesure de prendre certaines précautions d'asepsie ayant pu éviter une infection post-opératoire.

En 1581, François Rousset (1531-1587), médecin du Duc de Nemours , publie le Traitte nouveau de l'Hysterotomotokie ou enfantement caesarien, qui est extraction de l’enfant par incision latérale du ventre et matrice de la femme grosse ne pouvant autrement accoucher, et ce sans préjudicier à la vie de l’un ny de l’autre, ny empescher la faecondité maternelle par après ». Ce livre a des conséquences désastreuses pour les femmes qui subissent une césarienne par la suite, puisque son auteur affirme notamment « remettre la matrice doucement dans son lieu, sans rien y coudre, sa rétractation vaut mieux que couture ». Cette indication est longtemps suivie, entraînant de nombreux décès par hémorragie.

Il est à noter que Francois Rousset n’a, a priori, jamais pratiqué de césarienne lui-même et se contente d'être théoricien. Ambroise Paré (1510-1590), chirurgien renommé de l’époque et ami de l’auteur, ayant paraphé son ouvrage, on pourrait penser qu’il était favorable aux opinions de celui-ci. Sur la question, il écrit : « Or, je suis surpris que quelques-uns veulent assurer avoir vu des femmes auxquelles, pour extraire leurs enfants, l’on aurait incisé le ventre non seulement une fois, mais plusieurs : car telle chose par raison n’est pas du tout possible à croire, attendu que pour donner issue à l’enfant il faudrait faire une grande plaie aux muscles de l’épigastre, et pareillement à la matrice, laquelle étant imbue d’une grande quantité de sang et y faisant une division si grande, il y aurait une grande hémorragie, il y a encore d’autres accidents qui pourraient en arriver, et le pis une mort subite à la merci, et partant je ne conseillerai jamais de faire telle œuvre où il y a si grand péril et nul espoir en parlant humainement ». Il faut dire qu’entre temps, il assiste son élève, Jacques Guillemeau, dans des tentatives de césariennes sur femmes vivantes, en suivant les préconisations de Rousset et que le résultat désastreux en terme de mortalité des mères le font changer d’avis.

Depuis le XVIIIème siècle

Au XVIIIe siècle, un médecin d’Edimbourg imagine de procéder à la césarienne sous l’eau, dans un bain, afin de protéger les plaies des « miasmes ».

Il faut noter qu’à l’époque, une des grandes controverses entre les praticiens porte sur la question de la localisation de l’incision ; on ne sait pas avec certitude où inciser (sur le dessus de l’utérus, à côté du nombril côté droit, sur la gauche, en droit, en diagonale….).

Evolution des techniques

L’évolution de la césarienne avec de réelles chances de survie suit celle des progrès en matière d’innovations techniques, d’anesthésie et d’asepsie.

La suture

Vers le XVIIIe siècle, on commence à sortir des indications de Rousset et à tenter de suturer l’utérus. Toutefois, le mouvement d’involution de l’utérus et la peur que les agrafes ou le fil d’argent cisaillent l’utérus et se retrouvent in fine dans la cavité péritonéale posent réellement problème.

En 1769, Lebas est le premier à expérimenter une suture de l’utérus au fil de soie. La patiente survit malgré une infection post-opératoire.

En 1874, un chirurgien du nom de Sylvestrini utilise pour la première fois du fil élastique. Quelques tentatives avaient été faites auparavant, mais les sutures n’étaient pas assez étanches et les complications nombreuses.

En 1882, les allemands Kehrer et Sanger pratiquent la suture systématique de l’utérus. Ils obtiennent alors des résultats de l’ordre de 90% de survie.

La césarienne couplée à l’hystérectomie

Devant l’hémorragie déclenchée par l’incision de l’utérus, certains médecins croient préférable de pratiquer une hystérectomie après la césarienne. Pourtant, en 1825, la Revue médicale de Londres affirme dans son éditorial, que « l’extirpation abdominale de l’utérus était l’une des opérations les plus cruelles et les plus infaisables qui ait jamais été conçues et exécutées par la main de l’homme », même s’il est prouvé par ailleurs que l’ablation de l’utérus n'est pas mortelle en tant que telle (1768, Joseph Cavallini).

Vers la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXème, certains auteurs, dont Blundeli (1790-1877) et Michaelis (1798-1848), suggèrent que coupler la césarienne à une hystérectomie pourrait diminuer les risques liés à la césarienne.

En 1868, à Boston, le Docteur Storer est le premier à réaliser une césarienne sur femme vivante suivie d’une hystérectomie (il est également le premier chirurgien à utiliser des gants en caoutchouc…). Malheureusement, le fœtus décède et la mère ne survit pas à l’opération ; la presse scientifique n'est pas prompt à relayer l'expérience.

En 1876, c’est au tour du Docteur Eduardo Porro (1842-1902) de tenter à nouveau la double opération, sur une femme de petite taille, rachitique, avec une déformation du bassin telle que l’accouchement par voie basse semblait impossible. Porro pratique une césarienne (naissance d'un bébé en bonne santé) et recourt à l’hystérectomie en raison de l'hémorragie massive de la mère. Cette dernière rencontre des problèmes post-opératoires (suppuration de la plaie, infection urinaire) mais est vivante. Porro fait reconnaître l’utilité de la méthode par l’évêque de Pavie et celle-ci est diffusée largement et précisément dans les milieux de l’époque. Un élément à retenir de cette pratique radicale est que Porro est le premier à sortir l’utérus de sa cavité afin de mieux opérer.

25 ans plus tard, un chirurgien du nom de Truzzi rapporte avoir pratiqué une césarienne suivie d’une hystérectomie sur 1 000 patientes, avec un taux de mortalité de 25%, ce qui est, pour l’époque, de très bons résultats.

Cette méthode extrême est utilisée jusqu'à la seconde guerre mondiale dans les cas gravement infectés. L’apparition et le développement des antibiotiques met fin à cette mutilation.

L'inscision

En 1823, Auguste Baudelocque invente le principe de la césarienne extra-péritonéale, qui permet de réaliser une césarienne sans inciser le péritoine : cette pratique ingénieuse ne commence à être réellement utilisée qu’à la fin du XXème siècle.

Adolf Kehrer (1827-1914, Heidelberg) innove en proposant de pratiquer une section utérine segmentaire transversale avec des sutures soigneuses et la mise en place de mesures d'asepsie : une suture péritonéale de recouvrement (suture musculaire totale profonde). Il réalise et réussit cette opération pour la première fois le 25 sept 1881, dans des conditions difficiles (de nuit, dans une maison de campagne).

En 1882, Max Saenger (1853-1903, Leipzig) réalise également une césarienne avec une section utérine corporelle et, lui aussi, des mesures d’asepsie.

Cette pratique systématique de suture de l’utérus offre des résultats de l’ordre de 90% de survie. La césarienne demeure alors l’opération de la dernière chance.

La pratique de la césarienne connaît une nouvelle amélioration en 1907 par Frank, qui découvre l’incision segmentaire inférieure de l’utérus, mais celle-ci n'est pratiquée à travers le monde qu'à partir de 1920. L’année suivante (1908), Pfannenstiel met à l’honneur l’incision pariétale transverse, déjà proposée par certains confères antérieurement.

En 1916, le Dr Craigin prononce cette phrase, qui a longtemps condamné les femmes césarisées à la césarienne itérative : « once a cesarian, always a cesarian » (césarienne un jour, césarienne toujours). Cette citation doit être replacée dans son contexte : la dangerosité de la césarienne à cette époque (les antibiotiques n'ont pas encore été découverts, par exemple) et l’incision de l’utérus pratiquée largement à l’époque (verticale et corporéale) rendent l'opération très dangereuse et ont pour conséquence des taux de rupture utérine assez élevés lors des grossesses suivantes. Ce que Craigin prône avec cet adage, c’est le fait que chaque césarienne doit véritablement être considérée comme la dernière issue et qu’il ne faut pas la pratiquer sans de réelles raisons médicales.

En 1933, Jeselman invente la suture en un plan.

D’autres techniques améliorent les suites de couche des femmes césarisées, notamment la technique de Joël Cohen, appelée également méthode « Stark » ou « Misgav-Ladach » puis encore plus récemment, la redécouverte de la césarienne extrapéritonéale.

L'anesthésie

D'abord pratiquée grâce à l'éther, au chloroforme ou au protoxyde d'azone au XIXème siècle, les anesthésies se font donc par inhalation. A partir de la fin du XIXème siècle, l'utilisation de l'anesthésie par intraveineuse au moyen des barbituriques ou des curares permettent une suppression totale de la douleur grâce à l'anesthésie générale des patientes. L'anesthésie générale comportant ses risques propres, la césarienne est pratiquée en dernier recours dans le cas d'une dystocie rendant l'accouchement par voie basse impossible.

Enfin, à partir des années 1990, la pratique de plus en plus fréquente de l'anesthésie locorégionale, péridurale ou rachianesthésie, écartent presque tout risque anesthésique aux patientes.

Après avoir été une opération mortelle pour la mère, puis une opération plus maîtrisée mais tellement dangereuse qu’elle restait le dernier recours, la césarienne, est aujourd’hui une opération qui, tout en restant une chirurgie lourde, n’est plus synonyme de décès comme au temps des premières tentatives. Le corollaire de gestes techniques de mieux en mieux maîtrisés et de risques anesthésiques et post-opératoires réduits a été une augmentation très importante du nombre de césariennes à partir des années 1990.

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Sources :
La requête des enfants à naître – Bernard This
Histoire de naître: de l'enfantement primitif à l'accouchement médicalisé – Fernand Leroy
La césarienne – Claude Racinet
Histoires de la naissance à travers le monde – Jacques Barbaut

Page mise à jour en Septembre 2015.